Les écologistes lyonnais lui coupent les vivres : un théâtre menacé de disparition

23 mars, 2023 | LES SPECTACLES | 1 commentaire

Texte : Jacques Bruyas * Un théâtre de plus tirerait le rideau dans l’indifférence et un silence obscène des principaux acteurs de la vie culturelle ! Mais que se passe-t-il à Lyon sur le plan culturel ?

Je suis inquiet sur le devenir de ma ville. Lorsque j’étais enfant et même adolescent, Louis Pradel, maire de Lyon, avait collé sur la culture une chappe de béton à l’égal de ces cercueils qui condamnent les centrales nucléaires à l’arrêt définitif … on les croit éternellement étanches mais des fissures, fussent-elles microscopiques, laissent passer quelques toxicités inquiétantes.

Louis Pradel (à droite) et son successeur Francisque Collomb – Photo Georges Vermard (BML)

Et sur le plan culturel pradelien, il en était de même, où la musique certes avait quelque grâce aux yeux d’un adjoint à la culture schizophrène puisque coupeur de têtes et de budgets dans sa charge politique, il devenait dispendieux dans son « double » artistique, étant compositeur de musique orphéonique à ses autres heures.

Les écrivains hantaient la place Bellecour où étaient concentrées les librairies, une « place des angoisses » pour reprendre Reverzy… Les gens de théâtre tentaient de créer quelques pièces originales en le Théâtre de la Comédie puis le Théâtre du Cothurne ou plus tard les Ateliers et le Point du Jour…

Mais les bougres avaient compris qu’en essaimant petit à petit, ils arriveraient à faire de la ville éteignoir, la ville lumière sur le plan de la création dramatique….

Alors sous Francisque Collomb, et ses adjoint Joannès Ambre et André Mure, on se risqua à démultiplier les scènes et les petits lieux de création et à inciter nombre de comédiens à se risquer dans l’aventure et décrocher ensuite un sésame national… Le théâtre pour la jeunesse, les « cafés-théâtres » leur emboitèrent le pas….

Lyon était devenue la capitale du théâtre et de la création contemporaine et la Maison de la Danse, plusieurs CDN suivirent la docte institution du TNP… l’Opéra se risqua alors dans une aventure d’opéra-studio et de créations expérimentales…

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Michel Noir, Raymond Barre, avec des adjoints plus atypiques les uns que les autres (Jacques Oudot, Denis Trouxe), l’un se croyant la réincarnation de Malraux et l’autre de Diaghilev dans L’après-midi d’un faune…poursuivirent en cette voie.

Gérard Collomb, arrivé à la mairie centrale, appela aux Affaires Culturelles Patrice Beghain, un vrai connaisseur, lettré et très au fait, par son passage à la direction d’une DRAC, de la précarité des petits lieux de création, du bouillonnement culturel naturel incité par ces lieux et il initia puis institua un fonctionnement bougrement intelligent et novateur : »les scènes-découvertes »…

Vingt ans durant, plusieurs petits théâtres se retrouvèrent ainsi labellisés… des lieux où l’on entretenait un esprit de liberté, de solidarité, d’échanges et de responsabilité citoyenne très au fait avec la nouvelle donne municipale écologique et nupèsienne.

Seulement voilà, en politique, il en est comme en haute randonnée, on arrive avec son havresac et ses bienvenus sherpas, porteurs et aussi laudateurs de l’exploit qui n’en est pas un… Et il faut recaser tout ce petit monde qu’aux siècles monarchiques, on appelait courtisans, puis en République, partisans, puis en dérive idéologiquement sectaire, des assistés, voire des…mendiants.

Et fort des principes que « c’est avec du « vieux » ou « usagé » qu’on fait du neuf » et qu’on ne sait vêtir Paul qu’en déshabillant Pierre, la nouvelle équipe municipale de Grégory Doucet, peu avare en clientélisme s’évertue à coups d’entames drastiques dans les déjà modestes subventions allouées à nombre de petits théâtres à les inciter à la fermeture ou à la reprise par des militants de la « bonne cause »…

Ainsi Les Asphodèles et le NTH8 passèrent de vie à trépas en abandonnant les lieux qu’ils avaient créés et dynamisés à des compagnies plus idéologiquement ou politiquement convenables et maintenant, le Théâtre-Espace 44 (situé sur les pentes de la Croix-Rousse) est ainsi menacé avec une baisse de 72% de sa subvention municipale (de 35 000 à 10 000 euros, ndlr) !

Si ce principe des dominos ou du « pousse-toi de là que je m’y mette » est devenu usage, il risque fort de se retourner contre ceux qui l’ont institué et dans ce jeu de massacre, la seule victime des petits calculs, des petits égos et des ambitions aléatoires reste la Culture… et si un signal fort peut encore être donné, que ce soit sans plus tarder le retour aux normes des subventions précédemment allouées au Théâtre-Espace 44.

Ne serait-ce que pour me démentir lorsque je déplore le retour de ma ville à son immobilisme d’il y a soixante ans… on a les rêves pieux qu’on peut… !

*Jacques Bruyas, écrivain, est le président de l’UERA (Union des Écrivains Rhône-Alpes)

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Par : cof4

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1 Commentaire

  1. Greg

    Que ceci est intéressant et agréable à lire 🙂
    Avec une mention spéciale pour l’évolution de l’entourage des … hauts randonneurs !

    Réponse

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